La relation avec son père, son mari, son fils ...
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Vous en seriez étonné, mon très cher fils, si vous saviez les particularités que vous saurez dans l'éternité, et comme il fallait que je fusse engagée dans les croix du mariage. Il faut néanmoins que je vous avoue, que si j'eusse eu une conduite et direction spirituelle, je n'y aurais jamais consenti. (…)
Je me laissai conduire à l'aveugle par mes parents, qui, par la Providence de Dieu, ne m'engagèrent pas à des partis qui me recherchaient, où j'aurais été peut-être jusques à présent misérablement privée des grâces et des faveurs qu'il a plu à la divine Bonté de me faire après qu'il eut appelé à soi votre père avec lequel je fus mise (…).
Je crois et j'ai toujours cru que je n'y avais été engagée qu'afin de servir au dessein que Dieu avait de vous mettre au monde (…). La seule consolation que j'aie eue en cette condition a été de vous avoir donné à Dieu avant que vous fussiez au monde, et de ce
que votre père était si bon qu'il me permettait toutes mes dévotions, auxquelles même il avait de la complaisance, parce qu'il était homme de bien et craignant Dieu. (…) Ne vous étonnez pas si, me voyant libre, j'avais une si grande aversion du mariage. Cela provenait de ce que le fonds que Dieu me donnait, et que l'esprit de grâce par lequel il me conduisait, était incompatible avec d'autres liens que ceux de son saint amour. Et quoique j'aimasse beaucoup votre père, et que la perte que j'en fis me fût sensible d'abord, toutefois, me voyant libre et dégagée, mon âme se liquéfiait en actions de grâces de ce que je n'avais plus que Dieu à qui mon cœur et mes affections se pussent dilater, et se dilataient en effet sans cesse dans ma solitude, où je n'avais qu'à penser intérieurement à lui et à vous élever pour son saint service.
Relation de 1654
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Illustration: Valentina Turetta, Pionnière du Christ
Vénérable Marie de l'Incarnation Supérieure des Ursulines de Québec
Ursulines de l'Union Romaine, rome 1958